Le jeune D., 17 ans, avait une notification de la MDPH d’orientation en ULIS (Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire) jusqu’en août 2022 et d’orientation en IME (Institut Médico-Educatif) jusqu’en juillet 2025. Il était scolarisé en ULIS-collège depuis plusieurs années. Les parents du jeune D. avaient demandé à la MDPH de Paris un maintien dans cette ULIS-collège pour l’année scolaire 2022-2023. La MDPH avait refusé ce maintien le 7 juillet 2022 et décidé d’une orientation en … classe ordinaire !
Face à cette décision, les parents du jeune D. ont saisi, le 5 août 2022, le tribunal judiciaire via une procédure de référé, c’est-à-dire en urgence, pour contester la décision de la MDPH. Le tribunal judiciaire de Paris a donné raison aux parents, le 1er septembre 2022, en accordant à D. le maintien en ULIS.
Cette procédure en référé devant le tribunal judiciaire est différente des procédures de référé qui sont utilisées devant le tribunal administratif, par exemple lorsque les services de l’Education Nationale n’exécutent pas une décision de la MDPH d’attribution d’une AESH (Accompagnant des Elèves en Situation de Handicap). Il existe déjà une jurisprudence abondante sur les référés devant le tribunal administratif. Mais la jurisprudence de référé devant le tribunal judiciaire reste rare et est en train de se construire.
Les conditions d’un référé devant le tribunal judiciaire sont encadrées par l’article 834 du Code de Procédure Civile :
« Dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend »
Dans cette affaire, les parents ont communiqué au juge des pièces déterminantes montrant que le maintien en ULIS était une évidence : attestation da la psychologue de D., courrier du coordinateur de l’ULIS. Cela a amené le juge à conclure que le maintien « [apparaissait] conforme à l’intérêt de l’élève » et qu’«aucun élément ne [permettait] de craindre que la MDPH de Paris [ferait] obstacle à cette mesure ».
Bravo à Me Caroline Pierrey pour avoir obtenu cette décision de justice !
Cette décision nous semble très importante à double-titre :
- Cette décision montre que dans certaines situations, le référé au tribunal judiciaire pour contester une décision de la MDPH peut fonctionner, notamment en matière de scolarisation où il peut y avoir une urgence à prendre une décision avant la rentrée. Il est important alors de fournir au juge des courriers, bilans, attestations des professionnels qui suivent l’enfant pour lui montrer que la décision à prendre est évidente
- Cette décision de justice indique que la pratique de la MDPH de Paris d’orienter en classe ordinaire des élèves qui ont une notification d’orientation en IME n’est pas dans l’intérêt de l’élève. La MDPH de Paris a justifié, auprès de TouPI et des autres associations représentant les personnes handicapées et leur proches, ce type de décision en indiquant qu’elle devait « travailler avec ses partenaires », sous-entendant par là qu’elle ne faisait que prendre les décisions que la DSDEN de Paris lui demandait de prendre. La MDPH et la DSDEN de Paris semblent penser en effet qu’un élève que la MDPH aurait décidé d’orienter en IME n’a pas sa place en ULIS (quand bien même il n’y aurait pas de place en IME) et qu’il est mieux de le mettre en situation d’échec en classe ordinaire. Or les retours que nous avons des parents montrent que cela se traduit inévitablement par une scolarisation à temps partiel (1 heure par jour, voire moins) ou par une déscolarisation. Nous sommes très satisfaits que la justice ait reconnu que la MDPH n’agissait pas dans l’intérêt de l’élève en prononçant une décision d’orientation en classe ordinaire lorsqu’un enfant a une notification d’orientation en IME (et qu’il n’est pas accueilli en IME).
Retrouvez l’ordonnance du juge ici.